Transport solidaire : covoiturage et lien social pour pallier la carence en transports collectifs
Type d'action
- Développement social
- Développement durable
- Lien social
- Liens intergénérationnels
- Inclusion
- Aînés
- Accessibilité
- Partenariat / transversalité
Département
Haut-Rhin (68)Sur le vif
« Dans la même rue, un voisin en a transporté un autre. Sans le transport, jamais ils ne se seraient rencontrés », le Co-Président Fondateur de l’association Culture et Solidarité.
Porteur(s) de l'action
Association Culture et Solidarité
Objectif(s) et bref descriptif
Afin de pallier la carence de transports collectifs dans le pays du Sundgau (Haut-Rhin), l’association Culture et Solidarité a institué un service de chauffeurs bénévoles ouvert à tous. Dévolue à de petits trajets, ce « transport solidaire » permet aux habitants des communes impliquées de se déplacer, tout en participant au renforcement du lien social dans cette région rurale. Couronnée de succès, l’initiative a été reproduite dans d’autres bassins de vie, et est soutenue par le PETR – Pôle d’équilibre territorial et rural - du Sundgau.
Origine(s)
Située dans le sud de l’Alsace, la région du Sundgau jouit d’une situation particulière. Frontalière de la Suisse, elle s’organise autour de trois centres urbains distincts : Bâle, Mulhouse et Belfort-Montbéliard. Ses habitants sont dispersés dans plus d’une centaine de communes de taille réduite, regroupées en huit communautés de communes. Le territoire, majoritairement rural, ne dispose ni d’un axe routier transversal ni d’un pôle urbain structurant les déplacements. Dans ces circonstances particulières, la mise en place d’un réseau de transports collectifs pouvant satisfaire les demandes des usagers n’est pas dans les moyens des collectivités, et notamment du Pôle d’Equilibre Territorial et Rural (PETR) du Sundgau. La voiture individuelle est donc le principal moyen de déplacement à la disposition des habitants, ce qui impose des limites à la mobilité de ceux qui ne peuvent conduire. Personnes âgées dépendantes, jeunes ne disposant pas du permis, personnes atteintes d’un handicap… tous les habitants non motorisés voient leur autonomie réduite par l’absence de transports en commun adaptés, et se profile pour eux le risque d’un isolement renforcé. Pour y faire face, les collectivités ont tenté de développer des services de transport à la demande, comme le « Taccsi des Ainés » qui roulait à Spechbach (un service de taxi privé à faible coût destiné aux seniors et financé par le conseil départemental et la commune). Avec des fortunes diverses cependant, les coûts restant élevés pour des communes de petite taille.
Des citoyens tentent néanmoins de remédier à cette situation, et c’est par le biais d’une association, Culture et Solidarité, qu’un mode de transport alternatif se met en place. Depuis sa création en 2011, elle a pour vocation d’entretenir le lien social dans les villages de Wittersdorf (680 hab.), Emlingen (270 hab.) et Obermorschwiller (420 hab.) grâce à l’organisation d’activités culturelles et de solidarité. Un service de « transport solidaire », qui pourrait allier mobilité et convivialité, est déjà en gestation lorsque l’association est fondée. L’idée d’un système de chauffeurs bénévoles germe suite à la découverte d’un projet mis en place à Vaux-le-Pénil. Dans cette commune de Seine-et-Marne où résident 15 000 personnes, la mairie a acheté un véhicule et ce sont des habitants volontaires qui conduisent ce « taxi solidaire ». Après un voyage sur place, les responsables de l’association « Culture et solidarité » s’attellent à la mise en place d’un dispositif similaire dans le Sundgau. Mais avant, il importe de répondre à un certain nombre de contraintes :
- Par manque de moyens, un véhicule ainsi que des locaux ne pouvant être affectés par les collectivités.
- Pour les mêmes raisons, il est uniquement possible de développer un système basé sur le bénévolat avec une gestion administrative la plus légère possible.
- La volonté de ne pas concurrencer les taxis professionnels.
- Le souhait de contribuer à créer des liens sur le territoire.
En 2013, après deux ans de réflexion et de réunion préparatoires, Culture et Solidarité décide de lancer son « transport solidaire » lors d’une assemblée générale au cours de laquelle une quarantaine d’adhérents se déclarent prêts à devenir chauffeurs bénévoles.
Description détaillée
Le Transport Solidaire repose sur un principe simple : des chauffeurs bénévoles se mettent, avec leurs véhicules, à la disposition des habitants pour les conduire gratuitement sur de petites distances.
Et c’est justement cette simplicité qui fait le succès de l’initiative : quelques bénévoles et un téléphone portable suffisent à la faire fonctionner. Un planning est réalisé chaque mois, sur lequel chaque chauffeur se voit indiqué un jour de mobilisation.
Les cinq co-présidents et des bénévoles de l’association se relaient au standard – le téléphone portable – pour mettre en relation les demandeurs et les chauffeurs appropriés. Les trajets effectués se doivent de respecter certaines conditions : l’association, et ainsi les chauffeurs, doivent être contactés 48 heures à l’avance et les trajets ne doivent pas excéder 30 kilomètres. Si le service est ouvert à tous les habitants des trois villages concernés, sans conditions de ressources, il est néanmoins nécessaire d’être adhérent à l’association moyennant 5€ par an. Outre leur dimension pratique pour les bénévoles, ces restrictions visent à éviter de faire concurrence aux taxis.
La question de l’assurance ne se pose pas autrement que pour un banal covoiturage, celle du conducteur couvrant les passagers. Quant à l’essence, elle est prise en charge par les bénévoles.
Les trajets sont possibles pendant la majeure partie de l’année, exception faite des samedi après-midi et des dimanches. Un chauffeur est de permanence chaque jour, de 8h à 19h. S’il n’est pas disponible, un autre le remplace. Juillet et août, au départ non couverts, sont en phase de le devenir (en 2016) pendant une partie de la semaine.
Cette large disponibilité pourrait rebuter ou lasser les bénévoles, mais il n’en est rien. Comptant aujourd’hui plus de 50 chauffeurs, l’association est en mesure de leur proposer des permanences tous les deux mois, préservant ainsi le système de l’essoufflement. Les volontaires pour ces engagements sont dans des situations très diverses : un grand nombre de retraités, qui disposent souvent de beaucoup de temps libre, mais aussi des enseignants, disponibles certains jours de la semaine ou même des actifs, qui conduisent plutôt pendant les week-ends.
Ce fonctionnement simple, sans pesanteurs administratives superflues, convainc de nombreux habitants du bassin de vie. Le Transport Solidaire répond en effet à des demandes très diverses : certains vont au marché, d’autres à des entretiens d’embauche ou à des rendez-vous médicaux… Une dizaine de transports sont ainsi effectués chaque semaine. Si la majorité des personnes utilisatrices sont âgées, et plus en mesure de conduire, d’autres peuvent n’avoir ni véhicule ni permis, ou ne sont pas en capacité de se déplacer de manière autonome. Ainsi, une personne handicapée utilise régulièrement le service pour rejoindre ses cours de théâtre à Mulhouse. Tous y trouvent leur compte. Des liens se nouent, des voisins qui ne s’étaient jamais rencontrés font connaissance. Souvent, les chauffeurs repartent même avec un gâteau ou un kougelhof offerts par les personnes transportées. Les adhérents vont parfois jusqu’à se passer de l’organisation et contactent directement les chauffeurs pour convenir de leurs déplacements, créant ainsi une véritable dynamique transcendant le projet initial. Les transports sont parfois même mutualisés, permettant de nouvelles rencontres. Le dispositif s’inscrit donc bien dans la vocation de Culture et Solidarité, le renforcement du lien social de manière participative et intergénérationnelle.
Faire connaître le transport solidaire aux habitants
Le principal écueil rencontré a été de faire connaître le transport solidaire et de casser les aprioris qu’il pouvait soulever auprès des habitants. Pour nombre d’entre eux, il était au départ considéré comme un service à destination des personnes en difficulté et beaucoup ne souhaitaient donc pas l’utiliser pour ne pas être stigmatisés. Malgré une campagne de communication énergique, via la presse et des flyers, les résultats se sont donc fait attendre. C’est la sollicitation du curé local, autorité morale en Alsace qui a permis de briser la glace entre l’association et les habitants. Une annonce publiée dans le bulletin paroissial a permis de susciter la confiance. Petit à petit, les demandes ont ainsi commencé à affluer, le bouche à oreille se chargeant de faire le reste.
Une initiative reconductible
Fort de ce succès, le Transport Solidaire s’est étendu. Au-delà des trois communes originelles de 2013, ce sont deux autres villes, Heiwiller en 2015 et Schwoben en 2016, qui se s’y sont joint. Pour que le système continue de fonctionner efficacement, sans épuisement des chauffeurs, chaque nouvelle commune se doit d’en apporter un minimum de cinq. Cependant, les co-présidents de l’association estiment que leur structure ne peut s’étendre à plus de six localités, sous peine de prendre un poids administratif et organisationnel trop important. La dimension sociale, au cœur de l’initiative, en pâtirait d’autant. En effet, selon eux, deux éléments sont essentiels au bon fonctionnement du Transport Solidaire : il doit être investi par des volontaires et se déployer dans un espace restreint. Sa propagation ne peut donc passer que par sa multiplication sur plusieurs territoires.
Et c’est chose faite puisque le concept fait des émules, d’autres communautés de communes ayant lancé leurs propres services de covoiturage avec l’aide de Culture et Solidarité. Le principe est le même : une association prend en charge la planification et coordonne les chauffeurs locaux. Dans le cas de Spechbach, c’est l’association Loisirs et Amitiés qui l’organisent depuis 2016 tandis qu’à Aspach, faute d’association volontaire, c’est le CCAS qui a pris l’initiative – sans pour autant se limiter aux publics défavorisés. Cet essaimage est permis par la simplicité du dispositif : peu de moyens sont nécessaires pour le mettre en place. De même, les six communes du bassin de vie de Montreux-Vieux ont l’intention, en 2016, d’organiser un tel service à destination de personnes nécessiteuses
L’implication des élus locaux
Plus largement, ces démarches sont soutenues et promues par le PETR du Sundgau, qui cherche à développer des modes de transport alternatifs au véhicule individuel dans le territoire pour résoudre les problèmes de mobilité tout en s’orientant vers une politique de transports durables. Inspirées par le Plan Climat de 2008, plusieurs solutions sont proposées aux Communautés de communes, notamment la mise en place de transports solidaires mais aussi celle d’une organisation de l’auto-stop à l’échelle territoriale. Face à la baisse des dotations et au contexte particulier du Sundgau, le PETR, qui dispose d’une compétence d’aménagement du territoire et de développement local, favorise les initiatives de ce genre : elles peuvent aboutir à un renouveau de la mobilité pour les habitants, tout en participant du maintien du lien social. Concrètement, cela passe par la présence d’une chargée de mission aux Transports, qui assure communication et promotion à ces dispositifs auprès des communes. Elle a ainsi pu mettre en relation des bénévoles de Culture et Solidarité avec des associations situées dans d’autres communautés de communes pour qu’ils y promeuvent le Transport Solidaire.
Bilan
- Le service rencontre l’adhésion de la population locale. 182 trajets ont ainsi été réalisés en 2015.
Les covoiturages favorisent les rencontres : les chauffeurs s’engagent souvent pour rencontrer du monde et ces interactions peuvent déboucher sur des relations pérennes. - Des personnes autrefois isolées car se déplaçant difficilement peuvent désormais allier mobilité et sociabilité.
- Le tout s’inscrit dans une démarche globale vers des déplacements moins polluants, grâce à la réduction du nombre de véhicules sur les routes.
- Les activités proposées par Culture et Solidarité connaissent une participation croissante, du fait de la publicité que leur apporte le Transport Solidaire. L’association compte 224 adhérents en 2016, chiffre impressionnant au regard des 1300 habitants des trois communes sur lesquelles elle exerce son activité.
Partenaire(s)
- PETR du Sundgau
- Mairies des communes concernées
- Communautés de communes
Moyens
Financiers
Un abonnement téléphonique
Humains
Des bénévoles
Matériels
Leurs véhicules
Contact
CECEILLE Jean-Paul
Association Culture et Solidarité
Adresse : 26 rue Principale
68130
Emlingen
France
Tél. : 03 89 88 64 33
Courriel : culture-et-solidarite7@orange.fr
Site web : www.culture-solidarite.com
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