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Autonomie

Perche Digital Séniors : quand le numérique encourage le dialogue entre les générations

Type d'action

  • Aînés
  • Développement social
  • Inclusion
  • Lien social
  • Liens intergénérationnels
  • Partenariat / transversalité

Département

Eure-et-Loir (28)

Sur le vif

« Dans l’atelier il y a une dame de 91 ans. C’est incroyable, elle a encore envie d’apprendre. Elle pose des questions, ne s’énerve pas quand elle n’y arrive pas. C’est génial, on a vraiment le sentiment de servir à quelque chose », une élève de première, 19 ans, future éducatrice de jeunes enfants.

Porteur(s) de l'action

Perche Digital Séniors, devenu Digital séniors 28

Objectif(s) et bref descriptif

Afin de contribuer à la prévention de la perte d’autonomie et de favoriser le maintien du lien social auprès de séniors résidants sur un territoire rural du Département de l’Eure-et-Loir, une action de sensibilisation à l’utilisation d’outils informatiques (ordinateurs, tablettes…) a été initiée par un lycée agricole. Encadrés par une animatrice, des élèves animent, dans les communes volontaires, des ateliers collectifs et intergénérationnels réunissant une dizaine de séniors. Conduite en partenariat avec des acteurs du champ social et du développement économique du territoire, cette action, baptisée  à l’origine Perche digital séniors, puis Digital séniors 28, s’inscrit également dans une dynamique plus globale de développement du territoire, qui cherche à encourager l’implantation d’entrepreneurs de la silver économie.

Initialement expertisée en 2018, cette action à été mise à jour en 2021. Retrouvez la mise à jour dans la rubrique dédiée (voir plus bas).

Origine(s)

Perche digital séniors est née de la conjonction de plusieurs démarches, pédagogique d’une part et économique d’autre part. La première a été impulsée par le lycée agricole de Nermont à Nogent le Rotrou, établissement privé qui réunit sur deux sites 420 élèves, de la 4ème au BTS agricole. Cet établissement comporte également une filière Services aux Personnes et aux Territoires (SAPAT), dont les élèves montent régulièrement des projets collectifs afin de valoriser leur formation et de faire connaître l’établissement à l’échelle locale.

Progressivement, le lycée a tissé des liens avec différents acteurs du territoire et notamment le pôle d’équilibre territorial et rural (PETR) du Perche, un syndicat mixte qui accompagne 61 communes (42 000 habitants), dans le développement économique des différents secteurs d’activités locaux tel que le tourisme ou encore l’agriculture, ainsi qu’en matière d’urbanisme et de transition énergétique. Dans le cadre du programme européen Leader, le PETR a notamment engagé son territoire dans une dynamique de développement numérique, ce qui lui permet d’être retenu sur un projet de la communauté européenne, ReAAL.

Ce projet a pour but d’étudier l’impact de services numériques sur le bien-être, la santé et la vie active des séniors, dans une perspective de déploiement d’applications et de services issues de la Silver économie. A partir de 2015, 13 expérimentations sont conduites dans six pays auprès de 5 000 utilisateurs. En France, la société Trialog porte une de ces expérimentations afin de tester, sur un territoire rural et vieillissant, son application « Ici et Maintenant ». Baptisée Perche Digital, et soutenue par la Carsat Centre-Val de Loire, cette expérimentation doit permettre à des retraités isolés, via l’usage de tablettes numériques, de recevoir des informations en matière de prévention (nutrition, mémoire…), de maintenir du lien social en ayant connaissance des activités organisées par leurs communes (agenda) ou en utilisant la messagerie pour échanger avec leurs proches. 

Pendant 10 mois, 96 séniors de plus de 70 ans, repérés par les trois communautés de communes volontaires, sont sensibilisés à l’utilisation des applications développées par Trialog, à raison d’une séance de 2h00 par mois. A l’initiative de la Directrice du lycée de Nermont, six élèves volontaires de terminale SAPAT sont alors associés à la démarche dans le cadre des projets que l’établissement les encourage à mener. Lors des ateliers mensuels, aux côtés d’un adulte référent, ils accompagnent les séniors afin d’accéder à des services numériques. A la fin du programme ils en réalisent un bilan. Ce dernier confirme l’envie des aînés d’accéder à des services numériques mais souligne aussi la nécessité, avant même de développer des applications à leur usage, de les former en amont à l’utilisation des outils. 

Aussi, le lycée de Nermont, avec le soutien du PETR et du Conseil Départemental, dans le cadre d’un financement pluriannuel de la Conférence des financeurs, décide de construire un nouveau programme d’initiation au numérique, impliquant des lycéens.

Description détaillée

Une démarche inclusive et intergénérationnelle

En janvier 2016, une phase de prospection est initiée par le PETR auprès des communes. Afin d’intégrer le projet, celles-ci doivent mettre à disposition une salle bénéficiant d’une connexion internet correcte et s’engager à communiquer auprès des habitants de plus de 70 ans sur cette initiation aux outils numériques. Un an plus tard, 12 communes et 392 séniors sont concernés pour atteindre 21 communes et 692 séniors en septembre 2018. Face à l’engouement suscité par l’initiative, certaines communes ont même été amenées à créer plusieurs groupes de formations. 
 

Pour mener à bien ce déploiement, une coordinatrice et formatrice est recrutée par le lycée afin d’être l’interface et l’interlocutrice directe auprès des communes et des séniors concernés. Cette personne se relaie avec deux autres formateurs appartenant au corps enseignant du lycée de Nermont qui a inscrit Perche Digital dans son projet d’établissement. Ainsi, tous les élèves de la 4ème à la terminale, réunis au sein de groupes fixes de cinq ou six élèves, interviennent chacun deux à trois fois par an dans la conduite des ateliers de formation. A la différence de l’expérimentation de 2015, les lycéens interviennent désormais sur leur temps scolaire. Un minibus permet à la formatrice et au groupe d’élèves de se déplacer dans la commune où a lieu l’atelier, munis d’une douzaine d’ordinateurs portables et de tablettes mis à disposition des séniors qui ne disposent pas encore de leur propre matériel.  

S’adossant au temps de l’année scolaire, la formation comporte dix séances sur dix mois, à raison de 2h00 par mois. Les séances s’organisent par thématiques, selon les besoins émis par les séniors lors de l’évaluation de la première expérimentation. Les participants commencent ainsi par maîtriser les bases (utiliser les fonctions de l’ordinateur et/ou tablette, réaliser une recherche sur internet, gérer un agenda électronique…). Puis ils s’initient à des utilisations plus concrètes (démarches administratives, gestion du compte bancaire, création d’albums photos…). Chaque séance est structurée en deux temps : une partie théorique, réalisée par la coordinatrice qui explique les processus, donne les consignes, remet un document support ; puis une mise en pratique où les lycéens guident les séniors, les aident à prendre confiance en eux et corrigent les éventuelles maladresses. Les petits effectifs des groupes (pas plus de 12 participants) permettent ainsi de consacrer suffisamment de temps à chacun (1 élève pour 2 séniors). Enfin, un petit quizz vient clôturer la séance pour valider le niveau d’acquisition.

Des bénéfices au-delà de la pratique numérique

Au cours de la formation, les aînés font le constat d’un réel sentiment de progression. Ils ont la satisfaction de s’initier à une technologie dont ils ont bien conscience de l’aide qu’elle peut leur apporter, ainsi que du changement de regard que peut générer sa meilleure maitrise auprès de leur entourage. Ils apprécient particulièrement le caractère intergénérationnel de cette initiative, soulignant la patience et la pédagogie dont les jeunes font preuve face à leurs difficultés et blocages. Mais ces ateliers sont également l’occasion de se rencontrer, de créer des liens avec ses pairs ainsi qu’avec les lycéens, liens qui perdurent au-delà de la formation. Certains séniors continuent d’ailleurs à se retrouver à la fin du programme pour s’entre-aider. Les organisateurs souhaiteraient les mobiliser pour devenir « des passeurs d’usages », sorte de personnes ressources qui continueraient à animer des temps de rencontres entre participants déjà formés. Pour l’instant, seuls trois d’entre eux se sont engagés dans ce suivi. Ces « permanences », qui restent à formaliser, seraient gérées localement à l’échelle de chaque commune et coordonnées avec l’aide logistique des secrétaires de mairie.

De leur côté, les jeunes éprouvent un sentiment d’utilité à travers les marques de reconnaissance qui leur sont adressées. Attentifs aux besoins, ils contribuent à atténuer l’appréhension initiale des personnes âgées. Pour les élèves de la filière SAPAT, c’est également l’occasion de faire valoir une première expérience dans le domaine des services aux personnes. Ce projet permet également à l’établissement de donner corps aux valeurs qu’il défend auprès de ses lycéens. C’est enfin une opportunité pour promouvoir les qualités de sa pédagogie auprès des entreprises locales, afin d’ouvrir de nouveaux débouchés professionnels pour les élèves. 

A la recherche d’un modèle économique

L’ambition des porteurs de projet est désormais de pérenniser l’action et de développer un modèle économique moins tributaire des subventions publiques. A cette fin, Perche digital pourrait bénéficier de l’ambition, portée par les collectivités locales et notamment le Département, qui a fait du développement numérique une de ses priorités. Elles entendent jouer sur leur proximité avec la région parisienne pour attirer des entreprises de la silver-économie. A terme, l’initiation proposée par Perche digital pourrait permettre de constituer un panel de quelques 600 séniors, formés aux usages numériques et potentiellement volontaires pour tester et expérimenter de nouvelles solutions (objets connectés, applications, domotique…), grâce aux liens de confiance établis lors des ateliers.

En amont de cette évolution, le Lycée de Nermont a lancé en 2018 un living Lab qui proposera ce type de services aux entreprises. Un premier test est actuellement attendu avec une start-up, Selfadom. Elle a développé un diagnostic en ligne de l’adaptation de l’habitat, qui sera testé auprès de séniors initiés au numérique. Proposée pour l’instant gratuitement, cette première prestation doit permettre au Lycée de Nermont de construire une méthodologie, d’évaluer les ressources nécessaires, de définir le périmètre d’intervention ainsi que la valorisation financière d’une telle démarche. 

Mise à jour

Depuis l’expertise conduite en septembre 2018, la démarche Perche digital séniors a poursuivi son développement sur le même principe qu’à l’origine. Chaque année, le lycée continue de mobiliser des élèves volontaires, de la 4ème à la terminale, pour animer les ateliers d’initiation numérique à destination des séniors. Début 2020, une trentaine de communes accueillaient ces ateliers désormais ouverts aux personnes de 60 ans et plus, permettant ainsi de toucher plus d’un millier (1110) de personnes âgées depuis la création du dispositif. Preuve de ce succès, le déploiement de Perche digital séniors, rebaptisé à cette occasion Digital séniors 28, a été amorcé en 2020 auprès de deux nouveaux territoires, le Dunois, au sud du Département et le Drouais, au nord. Sur le premier territoire, ce déploiement s’est appuyé sur un deuxième site d’enseignement du Lycée Nermont, implanté à Chateaudun. Pour le second, un partenariat a été mis en place avec le Lycée Gabriel Bridet d’Anet, membre du CNEAP, le réseau des établissements agricoles privés. Un poste a également été créé au sein du Lycée Nermont, afin d’accompagner le déploiement, notamment sur le Drouais où des premiers ateliers ont pu démarrer sur huit communes, avant le second confinement imposé par la crise Covid. Cette dernière a marqué le coup d’arrêt temporaire en raison des contraintes sanitaires de ce déploiement, financé par la CFPPA d’Eure et Loir d’une part et par la Carsat Centre Val de Loire d’autre part. Cette dernière est d’ailleurs dans une perspective d’essaimage du dispositif sur d’autres départements de son territoire.

Si le fonctionnement global du dispositif reste le même, le contenu des ateliers a cependant évolué en fonction des remarques faites par les participants dans les questionnaires de satisfaction complétés à l’issue de chaque session. Ainsi, devant le succès de l’atelier consacré à la sécurité sur internet, sa durée a été étendue. De nouvelles applications favorisant les échanges en distanciel, telles Whatsapp ou Teams ont également fait leur apparition dans les thématiques abordées. Par ailleurs, il a été constaté que la majorité des participants possédaient un smartphone mais qu’ils en maitrisaient rarement les fonctions autres que l’appel téléphonique. L’utilisation de ce support est donc désormais intégrée à la formation, au même titre que l’ordinateur ou la tablette.

Toutefois, en raison des restrictions sanitaires imposées par la Crise Covid, les ateliers ont du être suspendus lors des périodes de confinement et n’ont pas pu reprendre de façon permanente en raison de l’inquiétude des séniors et des réticences des mairies qui accueillent les sessions. En revanche, plusieurs initiatives alternatives ont été mises en place, à la demande des lycéens comme des personnes âgées. Ainsi, lors du premier confinement, des élèves se sont portés volontaires pour assurer un lien hebdomadaire avec des participants qui en manifestaient l’envie. Cette initiative n’a pas été renouvelée pendant le second confinement puisqu’entre temps une série de tutoriels ont été réalisés par le lycée et mis en ligne sur youtube pour permettre aux séniors qui avaient commencer leur initiation de la poursuivre à distance. Ces tutoriels ne semblent cependant pas avoir convaincu le public sénior, en attente non seulement d’une aide technique mais également de réassurance et de lien social, pour lesquels le présentiel est essentiel.

La crise Covid a également déstabilisé l’activité du FabLab, qui doit permettre d’articuler le volet pédagogique et le volet économique du projet. Des contacts ont été initiés avec des start-up et deux innovations ont pu être testées par la communauté des séniors: un diagnostic virtuel de l’habitat en vue de son adaptation (selfAdom) et une montre connectée (SeniorAdom). Des liens sont également amorcés avec des start-up identifiées dans le cadre de VivaLab, le dispositif de soutien et d'accompagnement d'initiatives dans le champ de la prévention de la perte d'autonomie, porté notamment par l’interrégime des caisses de retraite, sans toutefois aboutir pour l’instant. Enfin, le projet d’ouverture d’un local avec pignon sur rue, au cœur de Nogent de Rotrou, a été suspendu.

Malgré ces difficultés, les partenaires ont maintenu leur confiance à Digital séniors 28 dont ils reconnaissent unanimement les résultats, la qualité du partenariat et la capacité à s’adapter à un nouveau contexte. Ils ont également renouvelé, voir amplifié leurs financements, dans le cadre du déploiement sur les nouveaux sites et de la création de nouveaux supports en distantiel.

Bilan

  • Favorise le lien social des personnes âgées isolées
  • Encourage les liens intergénérationnels
  • Lutte contre la fracture numérique, facteur d’exclusion sociale et de non recours au droit des aînés
  • Participe à la dynamique territoriale, notamment à la stratégie de Territoire Numérique porté par le pôle d’équilibre territorial et rural du Perche et par le Conseil départemental

Partenaire(s)

L’expérience initiale, portée par TRIALOG, en partenariat avec le Lycée de Nermont et le pôle territorial du Perche a reçu le soutien de la commission européenne, de la Carsat Centre Val de Loire et de la Région Centre Val de Loire.

Son prolongement, sous la forme de Perche digital seniors, porté par le Lycée de Nermont et le PETR, repose sur un financement, hors appel à projet, de la Conférence des financeurs de la prévention de la perte d’autonomie d’Eure et Loir.

Moyens

Humains

Le fonctionnement de Perche digital seniors mobilise 2 ETP, dont une coordinatrice recrutée à temps plein par le lycée, qui assure le suivi administratif et l’animation. Deux formateurs du lycée de Nermont interviennent également à temps partiel.
En 2020, une animatrice en charge du développement sur deux nouveaux territoire et de l’animation des ateliers sur le Drouais a été recrutée. Son contrat a pris fin au 31 décembre et n’a pas été renouvelée en raison de la crise covid.
Des élèves volontaires et bénévoles participent par groupe de cinq à l’animation de  chaque atelier.

Financiers

Budget prévisionnel de 90 000 euros sur 3 ans (financement des postes informatiques, frais salaires, frais de déplacements, maintenance informatique, location du minibus etc), financé par la Conférence des financeurs d’Eure et Loir, la Carsat Centre Val de Loire, la Maison départementale de l’Autonomie d’Eure et Loir.

Financement Carsat : 25 000 € en 2018 ; 7 000 € en 2020 pour la création des tutoriels ; Par ailleurs, la CNAV a financé 32 000 € dans le cadre d’un appel à projet national sur l’inclusion Numérique lancé auprès des Carsat fin 2019.

Financement Conférence des financeurs : 30 000 € en 2018, 2019 et 2020 ; 50 000 € à venir en 2021, pour le déploiement du dispositif sur d’autres territoires.

Matériels

Les communes mettent à disposition une salle municipale et doivent garantir une connexion internet suffisante. Les ordinateurs et les tablettes sont quant à eux apportés par l’établissement scolaire. A cela s’ajoute un véhicule pour le transport des coordinateurs et des élèves.

Contact

Olivier CORNET

Responsable formation et chef de projet

Lycée d’Enseignement Agricole Privé de Nermont

Adresse : 35, Rue de la Touche
28400
Nogent-le-Rotrou
France

Tél. : 02 37 53 08 46

Courriel : olivier.cornet@nermont.fr

Site web : www.nermont.fr

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