Moderniser sans exclure : une mission possible !
Type d'action
- Développement social
- Accès à l'emploi
- Partenariat / transversalité
- Pratiques professionnelles
Département
Alpes-de-Haute-Provence (04)Sur le vif
« Cette action a beaucoup changé les comportements professionnels, les réflexes. L’immédiateté des relations avec les usagers, grâce au site internet, nous permet vraiment de mieux adapter nos actions. » Un agent de la Région PACA.
Porteur(s) de l'action
Association « Moderniser sans exclure »
Objectif(s) et bref descriptif
Afin de garantir une prise en compte réelle de la parole des stagiaires de la formation professionnelle et des apprentis, l’association « Moderniser sans exclure » (MSE) s’appuie sur les outils numériques et anime un véritable dialogue entre stagiaires, centres de formation et services de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur, permettant d’améliorer le service public de la formation et de construire des solutions concrètes pour le présent et pour le futur.
Origine(s)
Au début des années 1990, Bertrand Schwartz, auteur du rapport éponyme à l’origine des missions locales, constate que les dysfonctionnements dans l’entreprise et la société font régulièrement l’objet de débats politiques et médiatiques. Mais l’avis des personnes principalement concernées par ces problématiques de précarité et d’exclusion n’est que rarement sollicité et difficilement pris en compte. Pour faire entendre la parole de ces personnes, il propose de recourir à la vidéo : il fonde l’association « Moderniser sans exclure » qui développera par la suite la notion « d’automédiatisation ».
L’automédiatisation consiste à utiliser la vidéo comme moyen d’expression : il s’agit de permettre à un groupe de personnes de documenter leur quotidien à travers des séquences filmées. Un travail de montages successifs permet de croiser les regards de différents acteurs et d’aboutir à un document finalisé qui peut alors servir de socle à la réflexion collective. Chaque diffusion est ainsi suivie d’un débat avec les décideurs de l’entreprise ou de la politique publique concernée. De manière pragmatique, ce type de démarches est uniquement mené dans des environnements favorables, dans le cadre d’entreprises ou de collectivités qui acceptent de donner la parole aux salariés ou aux habitants. Les organismes volontaires peuvent escompter des améliorations à plusieurs niveaux : les participants gagnent en estime d’eux-mêmes et développent leur capacité à s’exprimer dans le cadre d’un dialogue apaisé, les organisations découvrent des pistes d’amélioration de leur fonctionnement et les décideurs disposent d’une meilleure connaissance des contraintes vécues et perçues par leurs salariés ou les usagers de la politiques publique.
C’est notamment pour disposer d’une compréhension plus qualitative des parcours des stagiaires de la formation professionnelle et des apprentis, dont la compétence est régionale, que la Vice-Présidente de la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur en charge de ce sujet sollicite l’appui de MSE en 2004. L’association entame alors l’élaboration d’un diagnostic pour identifier l’existant en matière de participation des stagiaires de la formation professionnelle et des apprentis, qu’il s’agisse de démarches portées directement par la Région ou de pratiques propres aux 800 organismes de formation présents sur le territoire régional. Ce diagnostic fait ressortir plusieurs atouts, parmi lesquels l’existence de « délégués des stagiaires », chacun étant un stagiaire élu par ses pairs pour représenter sa promotion. Cet élément facilitant est lié au volontarisme de la Région qui a inscrit cette obligation dans toutes ses conventions de formations, quand bien même une réforme législative en avait supprimé le caractère obligatoire. Mais MSE repère malgré tout différents obstacles à la participation pleine et entière des stagiaires et des apprentis : difficultés à recruter des volontaires pour devenir délégué des stagiaires, grande variété d’interprétations de cette fonction, faible prise en compte des éléments remontés par les usagers, absence de transmission (et donc de capitalisation) dans le temps entre les promotions de stagiaires ou d‘apprentis, résistances de la part de certains acteurs… Sur la base de ces constats, la Région demande à MSE de lancer une expérimentation sur les territoires de Nice et de Marseille, aujourd’hui pérennisée et étendue à l’ensemble du territoire régional. Conscients de l’ampleur de la tâche mais désireux de réussir, les acteurs baptisent la démarche « Mission (im)possible ? ».
Description détaillée
Outre MSE, le projet « Mission (im)possible ? » réunit trois types d’acteurs : les stagiaires et leurs délégués, les organismes de formation et les services de la Région. Chaque début d’année, l’association organise des séances de sensibilisation à destination des organismes de formation, qui sont eux-mêmes chargés d’organiser les élections des délégués des stagiaires puis de les accompagner dans leurs fonctions. Ces délégués ont un rôle clef dans le dispositif de participation. Ils sont en effet chargés de relayer les difficultés rencontrées par leurs camarades. Pour ce faire, ils disposent d’une fiche-type, dont le contenu peut être nourri par l’ensemble de la promotion, sous l’égide de son délégué. Pour chaque problème rencontré, les délégués instruisent ainsi, à l’aide de leurs camarades, plusieurs rubriques visant à constater le problème en tant que tel, à en pointer les causes et à en expliciter les conséquences sur la vie des stagiaires. Enfin, une dernière rubrique permet aux stagiaires de proposer des solutions.
Le numérique pour rapprocher usagers et acteurs institutionnels
Stagiaires, délégués des stagiaires, organismes de formation et services régionaux ont tous accès à un site internet conçu spécifiquement pour la démarche. Accessible à l’adresse suivante : mi.msesud.fr, le site comprend une rubrique dédiée aux préoccupations remontées par les délégués des stagiaires via les fiches-types et qui sont visibles par tous. Chaque préoccupation est directement adressée à l’acteur susceptible de pouvoir y apporter une réponse (ex : chargé de mission de la Région s’il s’agit d’une problématique relevant des compétences de la collectivités), voire à plusieurs acteurs si la problématique fait appel à plusieurs champs d’intervention, comme par exemple pour les questions de logement. Il existe à ce jour 28 comptes-utilisateurs représentant autant de services régionaux et 300 comptes reliés à 300 organismes formateurs, vers lesquels les préoccupations des stagiaires sont redirigées. L’acteur destinataire d’une fiche faisant état d’un problème à résoudre devient alors responsable de son suivi et est tenu d’indiquer les différentes étapes de son traitement. Chaque fiche obtient donc un statut : en cours (de traitement), ayant une réponse (mais pas nécessairement de solution), réglée, abandonnée (si elle n’est plus d’actualité). L’acteur en charge de suivre le problème peut prendre contact avec le délégué ayant instruit la fiche via le site internet pour obtenir des compléments d’information si nécessaire. Qu’il puisse apporter une solution ou non, l’acteur en charge du traitement de la fiche doit apporter une réponse avec des explications détaillées. C’est bien à travers ce processus que le projet « mission (im)possible) prend tout son sens : non seulement les stagiaires sont incités à participer à l’amélioration du service public de la formation mais ils bénéficient d’un suivi de leurs remontées et peuvent vérifier son bon traitement par les institutions concernées.
Les stagiaires sont également invités à participer à la construction des réponses à certains problèmes. C’est dans cette perspective qu’un groupe de stagiaires a rédigé un guide sur le logement à destination des futures promotions. Sur le site internet, une rubrique intitulée « vos initiatives » est d’ailleurs consacrée à cette recherche collective de solutions. Là encore, plusieurs statuts permettent de suivre l’avancement des projets proposés : en étude, en cours de réalisation, réalisé, abandonné. Pour offrir un suivi global de la participation à l’échelle de la Région, le site diffuse également un bulletin météo, permettant d’avoir un aperçu territorialisé des dynamiques participatives dans le champ de la formation professionnelle.
Des chantiers annuels pour améliorer la politique de formation
Outre le développement et l’animation du site internet, MSE organise un chantier régional par année scolaire. En 2014-2015, les travaux ont ainsi porté sur les conditions de vie (logement, santé…) tandis que l’année 2015-2016 est consacrée à la question de l’orientation et de la fluidité des parcours. Pour ce faire, des ateliers sont organisés dans les territoires, réunissant les organismes de formation volontaires et leurs délégués des stagiaires. Les organismes formateurs animent trois à quatre ateliers de travail dans l’année et MSE se charge de la capitalisation des différents travaux menés localement. En 2014-2015 certains délégués des stagiaires ont souhaité aller encore plus loin et ont piloté eux-mêmes l’élaboration d’une enquête sur les conditions de vie des stagiaires.
En fin d’année scolaire, un évènement est organisé par MSE, réunissant 300 à 400 stagiaires et visant à dresser le bilan du chantier annuel. Cette journée prend la forme d’un « anti-colloque », puisque ce sont les délégués de stagiaires qui interviennent en tribune, devant de nombreux organismes de formation et acteurs institutionnels.
Un bilan positif et des perspectives très encourageantes
Plus de dix ans après le lancement de la « mission (im)possible ? », le bilan est largement positif. Le site internet dédié à la démarche a comptabilisé plus de 72 000 pages vues entre 2012 et 2015 et reçoit près de 5 000 visites par mois en moyenne. De leur côté, ce sont 569 délégués des stagiaires qui ont ouvert un compte depuis le lancement du site. La plateforme totalise également 300 comptes d’organismes formateurs et 28 comptes d’acteurs régionaux. 72% des fiches faisant état d’un problème ont bel et bien fait l’objet d’un traitement, ce qui signifie que dans 72% des cas, les stagiaires ont obtenu une réponse détaillée de la part des acteurs institutionnels. Sur un plan plus qualitatif, la démarche contribue à des améliorations à plusieurs niveaux. Au niveau pédagogique, les délégués des stagiaires apprennent à rédiger une fiche de remontée de problème, à s’exprimer au nom d’un groupe mais découvrent également les compétences des collectivités territoriales. Sur le plan social, la « mission (im)possible ? » permet aussi de trouver des solutions aux problèmes vécus par des stagiaires qui vivent parfois dans une très grande précarité. Le chantier 2014-2015 sur les conditions de vie est ainsi utilisé dans le cadre de la renégociation du plan Etat-Région sur la formation professionnelle. Au niveau démocratique, la démarche présente également une valeur ajoutée indéniable : il fait évoluer le rapport entre institutions et usagers, assurant une meilleure connaissance mutuelle et une meilleure prise en compte des contraintes de chacun. Enfin, sur le plan organisationnel, la « mission (im)possible » contribue à améliorer l’efficacité du service publique régional de formation. Du côté des organismes de formation, le bilan est, là encore, très positif. Ceux qui ont fait le choix de s’inscrire dans la démarche gagnent en connaissance de leurs stagiaires et constatent une plus grande adhésion de ces derniers au projet pédagogique et à la vie de l’établissement.
> Voir la vidéo Mission impossible ? – 5 ans aprés
Forte de cette réussite, l’association MSE essaie aujourd’hui d’essaimer le dispositif, en l’adaptant à d’autres territoires et d’autres champs de politiques publiques. En Région PACA, la démarche a par exemple été adaptée et étendue aux étudiants du secteur sanitaire social, politique publique gérée par une autre direction de la Région. Dans le Val-de-Marne, un dispositif similaire est en train de voir le jour, grâce à un groupe-projet mixte, composé de MSE, d’acteurs départementaux et d’allocataires volontaires. La démarche doit aboutir à un dispositif capable d’offrir un véritable espace de participation des allocataires du Revenu de Solidarité Active à la politique d’insertion du Département. Un autre projet est aussi en cours de développement dans le champ de la politique de la ville, soutenu par le Commissariat Général à l’Egalité des Territoires, afin d’accompagner plusieurs communes dans la mise en place des conseils citoyens prévus par la loi Lamy.
Bilan
- Amélioration de la politique régionale de formation et des conditions de vie des stagiaires, construction de réponses plus transversales aux problématiques rencontrées par les stagiaires.
- Evolution des relations entre institutions et usagers, évolution des cultures professionnelles.
- Acquisition de nouveaux savoirs, savoir-faire et savoir-être par les délégués des stagiaires.
- Capitalisation dans le temps et dans l’espace des problèmes soulevés et des solutions apportées.
Partenaire(s)
- Conseil Régional Provence-Alpes-Côte d’Azur (financeur)
- 300 organismes de formation
Moyens
Financiers :
145 000 € (subvention accordée annuellement par la Région et couvrant les moyens humains et financiers nécessaires au projet).
Humains :
4 ETP : 1 ETP d’ingénieur informaticien, 2 ETP de chargés de mission pour l’animation territoriale et 1 ETP de coordination générale.
Matériels :
Hébergement du site et nom de domaine.
Contact
DIEBOLD Michael
Moderniser sans Exclure - Sud
Adresse : 29, avenue de Frais Vallon – Le Nautile
13013
Marseille
France
Tél. : 04 91 10 40 00
Courriel : accueil@msesud.fr
Site web : www.msesud.fr
*Mention légale : Le contenu de cette fiche relève de la seule responsabilité de l'Agence Apriles et ne peut en aucun cas être considéré comme reflètant la position des partenaires soutenant le projet Apriles.