Lobaly, des jeunes mobilisent tout un quartier pour une coopération France-afrique
Type d'action
- Prévention
- Développement social
- Lien social
- Liens intergénérationnels
- Inclusion
- Loisirs
Département
Aisne (02)Sur le vif
« Je fais partie d'une association humanitaire nommée Lobaly. C'est peut-être ma seule expérience mais j'y ai rencontré beaucoup de valeurs comme la solidarité, la persévérance, le travail, la tolérance et surtout le sourire... » - extrait d'une lettre de Motivation d'un des jeunes engagés dans la dynamique
Porteur(s) de l'action
Association départementale de sauvegarde de l'enfance et de l'adulte de l'Aisne (Adsea 02)
Objectif(s) et bref descriptif
Pour créer du lien social, prévenir les conflits et mieux intégrer les différentes populations immigrées d'un quartier Zus, une équipe de prévention spécialisée mobilise les représentants de la principale communauté présente dans la cité (les Peuls du Sénégal) et en particulier ses jeunes dans un projet de coopération avec le pays d'origine.
Origine(s)
Le programme Lobaly tire son origine de l'implantation de l'équipe de prévention spécialisée de l'ADSEA 02 au coeur du quartier Europe de Saint-Quentin dans l'Aisne. En 2004, à leur arrivée dans la cité, les éducateurs spécialisés se trouvent confrontés à l'existence d'une communauté sénégalaise peule vivant "refermée" sur ses pratiques culturelles et relativement impuissante face au désarroi de ses jeunes. Perdus dans un entre-deux culturels, ces adolescents tolèrent mal le regard constamment tourné vers "le pays" de leurs parents. Or, les éducateurs eux-mêmes ne parviennent pas à instaurer un dialogue avec ces populations sur la question de l'éducation, et s'interrogent sur la méthode à mettre en oeuvre pour agir en faveur de la protection de l'enfance tout en conciliant le respect des traditions. Ils décident alors de travailler à l'inclusion de cette communauté dans le quartier composé également d'une part de population d'origine marocaine et française "de souche". Objectif : mieux comprendre et faire connaître la culture sénégalaise aux habitants et aux acteurs sociaux, et aider la population d'origine sénégalaise à s'approprier au mieux la culture française voir picarde. Pour favoriser cette rencontre, l'équipe de l'Adsea initie avec les jeunes l'organisation de fêtes interculturelles.
Description détaillée
Avec pour objet de favoriser à la fois la rencontre entre acteurs sociaux et habitants, ainsi que les différents types de population et les différentes générations présents sur le quartier Europe de Saint-Quentin, les fêtes "De la Picardie à l'Afrique" (ou inversement) prennent place au coeur de la cité le temps d'une soirée repas, soirée concert. Leur richesse réside principalement dans la préparation de l'événement entre habitants, associations, jeunes, bénévoles... Ainsi, les jeunes rappeurs d'origine sénégalaise préparent une représentation de danse folklorique picarde avec l'association locale tandis que les membres de cette dernière s'initient à la pratique du djembé et de la langue "rapée". Ou encore les femmes peules préparent des recettes culinaires picardes tandis que les Picardes cuisinent à "la peule". En provoquant la rencontre, ce brassage festif amène une appropriation de la culture de l'autre. Pour les professionnels de l'Adsea, c'est une façon d'être mieux connu de la population, de se rapprocher des habitants et du secteur associatif mais surtout de mieux cerner les problématiques concernant les jeunes et leur communauté.
Des groupes d'échange pour parler de "ce qui fâche"
C'est pour répondre aux problématiques identifiées grâce à l'organisation de ces trois soirées (2 en 2007 et une en 2008) que l'Adsea décide d'organiser des groupes d'échanges entre les familles et acteurs de la vie sociale et institutionnelle du quartier. Réunis au collège du secteur, ces "formations" animées par un éthno-psychologue d'un cabinet de consulting spécialisé (Afrique Conseil), ont pour objet d'échanger sur les "sujets qui fâchent" et qui créent des blocages entre les générations et les cultures. Ainsi, se retrouvent autour d'une table parents, éducateurs de l'ADSEA, animateurs des centres sociaux, membres de la PJJ, policiers, en tout une trentaine de personnes qui sur plusieurs journées se penchent sur la parentalité, l'interculturalité, l'enfant africain face au système socio-éducatif... Des moments qui permettent aux familles d'échanger entre elles sur des sujets "douloureux" (les mariages mixtes, la perte des coutumes), de les encourager à mieux communiquer avec leurs enfants, et qui offrent aux professionnels une connaissance du fonctionnement communautaire propre à adapter et améliorer leur action. Une "formation" dont les jeunes ont eux aussi souhaité bénéficier et qui, organisée en lien et à la Mission locale de Saint-Quentin, a permis d'aborder sur trois journées la problématique de l'interculturalité et de l'intégration chez les jeunes d'origine africaine et maghrébine.
Des projets collectifs pour les jeunes et le quartier
C'est également pour aider jeunes et parents à renouer le dialogue et toujours favoriser leur inclusion que l'Adsea va se lancer dans l'accompagnement de projets collectifs en lien avec le territoire d'origine de la population sénégalaise. De fait, dans le cadre des activités festives et de formation, les éducateurs entrent en relation avec l'association des ressortissants de Lobaly : association qui fédère les Sénégalais du quartier issus pratiquement tous de cette localité et qui vient en aide à la communauté restée au pays. Or, les éducateurs ont pu identifier un malaise parmi les jeunes d'origine sénégalaise qui notamment vivent mal l'investissement financier de leur famille (qui en consacrant une part de leur revenu à la tontine privent leurs enfants du minimum nécessaire) pour ceux du pays. Une coopération avec le village de Lobaly s'installe donc qui consiste dès 2007 à récolter des fonds à travers des micro initiatives (vente de pâtisseries, organisation de soirées... ) pour équiper en médicaments la case santé du village sénégalais.
De cette mobilisation et de l'envie des jeunes de continuer à s'investir pour le village, va naître en 2008 un projet de création de jardin partagé à Lobaly baptisé Intégr'Action. A la suite de l'engagement en faveur de l'équipement de la Case Santé, l'association sénégalaise des jeunes de Lobaly exprime le souhait de disposer d'un jardin collectif partagé. Les jeunes mobilisés par l'Adsea souhaitent immédiatement répondre à cette sollicitation. L'équipe d'éducateurs profite de cette motivation pour monter avec eux un projet qui allie des objectifs d'insertion sociale et professionnelle. L'idée est de préparer un déplacement au Sénégal, au village de Lobaly, pour y implanter un jardin partagé sur le modèle des jardins ouvriers collectifs à la française.
Une insertion sociale et professionnelle
Un groupe de jeunes est constitué qui est associé tant aux réunions de définition du projet qu'à sa mise en oeuvre pratique. Composé de 21 personnes, le groupe réunit des filles et garçons âgés de 17 à 22 ans et rassemble une part de jeunes "qui fonctionnent bien à l'école", une autre part de jeunes en difficultés d'insertion sociale et enfin sept jeunes extérieurs au quartier issus de la Mission locale. L'objectif est que l'émulation du collectif profite à chacun dans la diversité des situations individuelles. Au sein du groupe, les 14 jeunes du quartier mobilisés par l'Adsea sont plus particulièrement en charge de la mobilisation financière et de la communication sur le projet : ils organisent ainsi comme ils ont pu déjà le faire pour l'opération case santé des micro-activités permettant de récolter des fonds pour soutenir l'initiative : ateliers tressage de cheveux, tenue de stands contrôle et sécurité lors des manifestations, soirées interculturelles, soirées théâtre... Les sept jeunes issus de la Mission locale sont, eux, plus particulièrement en charge de l'acquisition des techniques de jardinage propres au développement d'un jardin potager "tropical". De fait, un volet insertion professionnelle complète l'action de prévention auprès des jeunes. La mission locale est ainsi partenaire de l'initiative et accompagne sept jeunes. Recrutés à la suite d'une séance d'information collective où jeunes de l'Adsea et professionnels leur ont présenté le projet, ces jeunes âgés de 18 à 25 ans qui ont exprimé le désir de s'associer à l'initiative à travers une lettre de motivation, partagent soit des compétences professionnelles liées à l'agriculture soit un goût pour l'engagement "humanitaire". De mai à octobre, ils se rendent tous les samedis matins au jardin ouvrier du quartier Europe et se forment aux techniques maréchaires. Un organisme de formation spécialisé dans la culture tropicale (JTS semence) vient compléter leur formation. L'expérience leur permet de se mobiliser dans un projet pour mieux se remobiliser pour leur projet d'insertion.
De forts partenariats et un large réseau d'acteurs
L'équipe de l'Adsea témoigne d'une réelle dynamique à l'échelle du quartier initiée par cet enchaînement d'initiatives mobilisant jeunes et parents. Des jeunes qui ne fréquentaient pas le local de l'association viennent aujourd'hui spontanément et le nombre de ceux touchés par les actions est estimé à 300. Cette dynamique est le fruit d'un engagement partenarial fort des acteurs du quartier. Les formations Afrique Conseils ont ainsi permis de rapprocher les institutions et associations agissant sur la zone. Un comité de pilotage ainsi que des comités de suivi coordonnent et organisent la mise en oeuvre des projets. Il réunit les médiateurs politiques de la ville, l'Association des ressortissants de Lobaly, l'Association de soutien aux travailleurs immigrés Asti, la mission locale, le bailleur social la Maison du Cil et la Circonscription de prévention et d'action sociale (Cipas), ainsi que les jeunes (6 réguliers) et des parents (deux permanents). La Maison du Cil est également très investie financièrement dans le soutien à ces activités. Ainsi, grâce au bénéfice dégagé par l'abattement sur la Taxe Foncière sur les propriété bâties accordé dans les Zones urbaines sensibles, le bailleur soutient les actions de cohésion sociale par du financement ou de la mise à disposition de locaux.
Aujourd'hui, le comité de pilotage s'est constitué en association. Présidé par une des jeunes filles engagées dans les actions, son nom et son logo sont aussi l'oeuvre du groupe de jeunes. Le Mouvement interculturel africain, MIFA, entend porter et développer sur le long terme des projets au service de l'inclusion de toutes les populations du quartier Europe et de Saint-Quentin.
Bilan
- Création d'une dynamique de Développement social local sur le quartier.
- Ouverture des communautés "ethniques" les unes aux autres.
- Meilleures relations entre habitants et professionnels engagés dans le social, la sécurité et la justice.
- Animations et initiatives du quartier croissantes : 10 sur l'année 2008.
- Mobilisation des jeunes pour la vie sociale de leur quartier.
- Evolution du comportement des jeunes : rescolarisation, diminution d'actes délictueux.
- Acquisition de compétences et d'expériences valorisables dans le projet professionnel.
Partenaire(s)
Association des ressortissants de Lobaly
Association danses picarde Ce'Routells
Centre social Artois
Parents
Collège Montaigne
Circonscription de prévention et d'action sociale du Conseil général de l'Aisne
Ville de Saint-Quentin
Conseil régional de Picardie
Caisse d'épargne
Ministère de la Coopération
Maison du Cil
Afrique conseil
Mission locale
Association des Jardins ouvriers
Centre social Europe
Lycée Condorcet
Association ASTI
Association les Guides du Soleil
Médiateurs Politiques de la ville
Moyens
Humains : Trois éducateurs spécialisés ADSEA
Financiers : sur l'action Lobaly Sénégal 72 000 euros financés par la Caisse d'Epargne, la Maison du Cil, la Région, le ministère de la coopération ainsi que les opération d'autofinancement.
Contact
TIRANNO David
Association départementale de sauvegarde de l'enfance et de l'adulte de l'Aisne (Adsea 02)
Adresse : 2 bis avenue Gambetta
02000
LAON
Tél. : 03 23 23 24 66
Courriel : adsea.laon@wanadoo.fr
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