La convergence PA/PH se concrétise en Corrèze
Type d'action
- Développement social
- Aînés
- Handicap
- Partenariat / transversalité
- Pratiques professionnelles
Département
Corrèze (19)Sur le vif
« La convergence aujourd'hui, en pratique, c'est une organisation mutualisée des dispositifs d'accueil, d'évaluation, de construction et de suivi des plans d'aide pour les personnes âgées et les personnes handicapées, destinée à apporter des réponses qui restent adaptées à la situation de chacun », la chef de projet MDA.
Porteur(s) de l'action
Conseil général de Corrèze
Objectif(s) et bref descriptif
Pour faciliter la vie de toute personne en perte d'autonomie, quelque soit son âge ou la nature de son handicap, la Corrèze, département rural de 250 000 habitants, qui compte parmi les plus âgés de France, se lance dans une expérimentation autour de la « convergence ». Il s'agit d'offrir aux gens un guichet unique irriguant l'ensemble du territoire, une « Maison départementale de l'Autonomie » (MDA) intégrant la Maison départementale des Personnes Handicapées (MDPH) et la direction de l'autonomie du Conseil général. Un vaste chantier qui s'appuie sur le réseau de proximité existant et s'inscrit dans une gouvernance renouvelée, grâce à une méthodologie rigoureuse d'accompagnement du changement.
Origine(s)
Le concept de MDA est né au cours des premières réflexions sur la création d'un nouveau champ de protection sociale pour la prise en charge de la dépendance (ou « 5ème risque ») et du principe d'un droit universel d'aide à l'autonomie (Rapport Gisserot de 2007). Si les contours de ce débat sur la convergence ont évolué, le défi initial demeure : les organisations représentatives restent très attachées au rapport Gisserot, en particulier à la notion de droit universel à compensation, qui prend en compte toutes les personnes, quel que soit leur âge ou leur situation de handicap, dans le cadre d'une politique solidaire et concertée. Le préalable juridique est celui de la définition du handicap de la loi 2005-102 s'appliquant aussi bien aux personnes âgées. Ainsi, la mise en place de services ou de lieux communs pour entraîne, de facto, des questions concernant les points de convergence. Peut-on considérer les personnes âgées et les personnes handicapées de la même manière... Les outils d'évaluation peuvent-ils être communs ... La restriction de l'autonomie liée à l'âge peut-elle être appréhendée de la même manière que la restriction de l'autonomie liée à d'autres facteurs... Cependant, si l'enrichissement des deux cultures est réel, leurs histoires et leurs militantismes sont néanmoins différents. Au nom des personnes âgées, ce sont essentiellement les professionnels qui s'expriment ; tandis que pour les personnes handicapées, ce sont les personnes elles-mêmes ou des associations d'usagers. Pour autant, le rapprochement des cultures est non seulement souhaitable, mais également possible tant sur le plan des métiers, des outils, que des réponses, en respectant les spécificités des deux champs. C'est pour s'engager dans cette voie, dite de la « convergence sans confusion », et sans attendre les éventuelles évolutions législatives sur la Dépendance, que le Département de Corrèze se porte volontaire pour expérimenter une MDA en 2008.
Description détaillée
De la MDPH à la MDA : accompagner le changement
Le passage d'une MDPH à une MDA se fait par étapes, avec l'assurance d'un portage politique fort. Car dès avant la loi 2005-102 sur le handicap et la création des MDPH, le Département affirme sa volonté d'être pilote en matière de perspectives de convergence des missions d'information, d'accueil, d'évaluation au bénéfice de toute personnes en perte d'autonomie, quel que soit son âge ou la nature de sa perte d'autonomie.
Mais au préalable, il faut bien considérer que la MDPH est un dispositif relativement récent, dont les contours sont encore fragiles : Des évolutions rapides ont généré un sentiment d'insécurité du personnel. La mutation de la MDPH vers une MDA, par l'organisation mutualisée des dispositifs d'accueil des personnes handicapées, adultes et enfants mais aussi des personnes âgées, s'inscrit donc dans cette relative instabilité.
Le Département constitue, dès 2008, une « équipe projet » qui s'appuie sur une méthodologie intégrant, sur une période de 4 ans :
- Une phase préalable d'organisation du pilotage et de diagnostic (2008-2009) ;
- Une phase opérationnelle de structuration du guichet unique, à partir du réseau de proximité (2010-2011).
De l'observation partagée autour de la construction d'une culture commune PA/PH (2008-2009)...
Pour mener à bien ce projet, un pilote, chef de projet, agent catégorie A, est recruté, sous l'autorité hiérarchique et fonctionnelle du Directeur Général Adjoint responsable du Pôle Proximité Solidarité. Ce chef de projet est chargé d'établir un état des lieux, un diagnostic, la coordination et l'animation interne et externe, le suivi et les échanges avec les directions concernées, les institutions et les partenaires. Dans le cadre de l'appel à projets MAIA-MDA lancé par la CNSA, la réflexion est lancée en 2008 : consultation des élus et des délégataires des champs du handicap et du grand âge en septembre, réunion de travail des équipes MDPH et de l'Equipe Médico sociale en octobre, et validation du projet par l'assemblée plénière du Conseil général en décembre.
En 2009, la réflexion continue sur les différentes pistes de convergence possibles :
- Accueil unique,
- Harmonisation des pratiques d'évaluation,
- Accompagnement et suivi de certaines situations,
- Pertinence de la logique de territorialisation et de la convergence des services à la fois pour les personnels qui acceptent de traiter des deux populations et pour les bénéficiaires, le sens de cette territorialisation (leur rend t-on service en leur accordant tout à proximité...).
Pour promouvoir des services plus efficaces, tout en conservant leur spécificité (convergence sans confusion), il s'agit de penser davantage en termes de « besoins » (se loger, se nourrir, se déplacer, rencontrer les autres, trouver une utilité sociale, vivre une citoyenneté) qu'en termes de « prestations ». Cela implique de bien connaître les besoins et les attentes des personnes âgées et handicapées, d'une part et de faire un état des lieux de la politique de l'autonomie dans le Département.
L'observation partagée des besoins des personnes est un préalable nécessaire à la construction d'un partenariat d'action. Ainsi, l'enquête HID révèle qu'en dehors des besoins spécifiques à chaque handicap, les types d'aide attendues sont les mêmes que pour les personnes dites âgées. Et en Corrèze, les personnes dites âgées constituent 30% de la population (Indice vieillissement 121, soit le 5e Département français). Par ailleurs, l'âge, la dépendance et le handicap constituent des facteurs d'isolement.
Puis, pour créer les conditions d'une culture commune PA/PH, un état des lieux est réalisé en interne (MDPH, Conseil général) à partir de rencontres par direction, par service et individuelles. Il s'agit d'identifier les missions, les organisations, les services directement concernés par la convergence PA/PH, les méthodes de travail et de partenariats concourrant directement (équipes PA et PH) ou de manière plus transversale (service social, politiques de l'insertion et du logement, transport, famille, services techniques et informatiques) à la politique de l'autonomie. A partir de ce point d'étape en Comité de direction du Pôle Proximité Solidarité, des groupes de réflexion sont constitués par missions : l'information/ accueil / évaluation, l'instruction et le suivi, la coordination avec le réseau. Ces temps de travail permettent de :
- Faire ressortir le socle commun (en terme d'objectifs et de missions).
- Intégrer la nécessité de mutualiser pour pouvoir travailler ensemble et innover.
- Partager des concepts d'évaluation, et intégrer les outils dans la démarche d'évaluation (grilles Aggir et GEVA).
- Repérer ce qui ne fait pas partie du socle commun mais de compétences spécialisées.
- Concilier les exigences parfois contradictoires (le temps de l'usager n'est pas celui de l'administration), par exemple dans la définition de procédures d'urgence.
...à l'action : la structuration du guichet unique, à partir du réseau de proximité (2010-2011)
Lors de la phase opérationnelle, l'aller-retour régulier entre le politique et le technique, et les soutiens méthodologique et financier de la CNSA sont nécessaires. Gouvernance locale et nationale sont, dans ce projet, intimement liées. En termes de méthodologie, la création de la MDA s'appuie sur trois piliers : l'organisation interne, le réseau de proximité, la coordination et les partenariats.
La direction de l'autonomie
Au-delà de l'idée initiale d'un « droit à l'autonomie pour chacun dans le respect de son projet de vie », la volonté politique de convergence se traduit dans des choix de gouvernance, à même de proposer des réponses de proximité cohérentes. La mise en place de cette culture commune commence en interne, par la réorganisation du Pole Proximité Solidarité avec une Direction de l'Autonomie englobant la MDPH. Présenté aux élus, le projet de direction est ensuite traduit dans un schéma d'organisation fonctionnelle, la MDA faisant émerger un véritable projet de service. Fin 2010, la direction autonomie est accueillie dans les locaux de la MDPH, améliorant ainsi la lisibilité de la politique départementale.
La MDA est pilotée par le comité de direction du Pôle Proximité Solidarité, instance interne au Conseil général qui associe, autant que de besoin des experts (CNSA, Etat, partenaires...). La Commission exécutive (Comex) MDPH se verra élargie aux Personnes Agées, dans le cadre d'un Conseil d'Orientation Stratégique, pas encore opérationnel. Il est proposé pour l'instant d'élargir le Comex, en y associant des représentant des personnes âgées (élu, représentants du CODERPA, des établissements, des services, des associations).
La structuration du réseau de proximité
La maison de l'autonomie s'appuie sur ses relais de proximité, appelés à constituer sur tout le territoire un outil de veille, d'alerte et de prévention. En effet, 36 instances de coordination gérontologique existaient déjà sur les territoires, soit une instance par canton. C'est sur ce réseau historique et soutenu par la collectivité (soutien financier et technique de trois coordinatrices PA/PH, travailleurs sociaux territoriaux qui ont toute légitimité pour être ce relais de proximité pour les usagers, leurs familles, les partenaires, le lien entre la maison de l'autonomie et le territoire) que s'ébauche la future MDA. Ainsi, chaque coordinatrice a pu organiser des réunions techniques sur son territoire, accompagnée du chef de projet MDA en septembre 2009. L'ouverture de ces instances de proximité au handicap, accueillie favorablement par les équipes, est confirmée lors d'une réunion de restitution en novembre 2009, qui permet de poser les bases d'une nouvelle convention triennale entre le Conseil général et les instances, rebaptisées « instances de coordination pour l'autonomie » (ICA), guichet unique irriguant tout le territoire. Cela implique en mars 2010, des rencontres individuelles du pilote et des coordinatrices départementales avec les élus de la collectivité, les présidents des instances de coordinations (près de 50 rencontres). Puis, en avril 2010, des réunions territoriales sur les trois unités territoriales du Départements, avec les personnes ressources des instances de coordination permet une approche plus pragmatique (collecte des besoins de formation au plus près de la réalité de l'exercice quotidien des nouvelles missions attribuées au ICA). Enfin, des échanges des équipes de coordination ICA avec le personnel de la MDPH (équipe d'évaluation, chargé du suivi et de la coordination) permettent de mieux connaître les besoins techniques et de mettre en place un programme de formation. Trois sessions de formation réunissent environ 20 personnes des ICA et d'autres services de coordination, sur les droits des personnes handicapées, les procédures et les prestations (PCH, APA, etc.). A l'avenir, l'élaboration du Schéma départemental de l'autonomie permettrait aux deux cultures de se rencontrer et de partager sur « ce qu'il reste à faire ».
La construction d'un partenariat d'action
La construction de la Maison de l'Autonomie comme guichet unique et véritable boîte à outils de l'autonomie sur le territoire, s'inscrit dans des partenariats renforcés, tant internes qu'externes, avec les acteurs des champs sanitaire, social, médico-social, institutionnels et associatifs.
Par exemple, la structuration du réseau de proximité de la MDA, qui participe à moderniser et à professionnaliser le maintien à domicile, est un axe de la convention Cadre de Modernisation de l'Aide à Domicile entre la CNSA, l'Etat et le Conseil général. Un point d'étape de l'expérimentation est présenté en juin 2010 aux membres de la Commission des Droits et de l'Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) et aux associations représentatives des PH de Corrèze.
Phase d'évaluation et de suivi
La phase d'évaluation et de suivi est essentielle pour permettre les ajustements nécessaires au projet. Ainsi, certaines difficultés et réussites sont identifiées qui permettent :
- D'anticiper certaines réorganisations (exemple : le décloisonnement maintien à domicile/hébergement).
- De relever les incohérences et les procédures redondantes dans le fonctionnement et la difficulté de s'affranchir des modalités de fonctionnement antérieures de la MDPH identifiée certes comme un guichet pour les droits et prestations mais pas encore comme un lieu ressource.
- De réfléchir à une simplification des modalités de fonctionnement, aux missions de contrôle et de suivi et aux outils d'évaluation, et l'harmonisation des procédures (comme le contrôle d'effectivité des prestations APA et PCH) afin de les alléger au maximum.
Si l'adhésion des équipes PA et PH au principe de la convergence est au rendez-vous, la construction d'une équipe pluridisciplinaire unique est d'une grande richesse pour les professionnels en terme de compétences, d'expertise, et d'implication. Pour pallier aux cloisonnements encore nombreux (entre non seulement les secteurs de la gérontologie et du handicap, mais aussi en interne), le « travailler autrement » est un exercice difficile qui a besoin de pédagogie, de sens, voire d'adhésion. Du côté des moyens, des formations sont mises progressivement en place, à la demande, mais les besoins sont difficiles à appréhender. Par ailleurs, l'exigence de performance de la MDA telle qu'elle a été posée dès l'origine, implique de travailler sur la qualité des outils (ses services, leur organisation, l'articulation avec les partenaires).
La communication auprès des usagers sera mise en place début 2011.
Bilan
- Malgré les obstacles conceptuels et culturels et des approches encore diversifiées (le cadre légal maintenant une distinction dans le traitement des demandes), une culture d'équipe et d'échanges est en train progressivement de s'installer, en faveur de la convergence :
- Pour les usagers et professionnels : amélioration de la cohérence et la lisibilité de l'accueil,
- Un échange gagnant-gagnant : le professionnalisme des équipes PH « contre » la territorialisation avancée de la coordination gérontologique,
- Simplification de l'organisation interne : amélioration des échanges entre les services de la même direction et la transversalité entre les directions.
- Rationalisation : gains d'échelle en cours d'évaluation et en lien avec les deux autres sites d'expérimentation et la CNSA.
Partenaire(s)
Ce chantier d'intégration des dispositifs d'accueil et d'évaluation des personnes âgées et handicapées, implique de nouer des partenariats forts tant internes qu'externes avec :
- Les services de la Direction de la Solidarité Départementale, la MDPH.
- L'Etat (DDJSCS), l'URCAM, l'ARS, les acteurs mobilisés pour accueillir et évaluer comme les CLIC, les hôpitaux, les réseaux de santé, les CCAS, les caisses de protection sociale, et les gestionnaires d'établissements et services médico-sociaux.
Moyens
Humains
- Un chef de projet catégorie A, placé sous l'autorité du DGA.
- Projet à moyens humains constants
- Pas de prestataire
Financiers
230 000 euros CNSA
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Contact
Serandon Marie-Anne
Conseil général de Corrèze - Pôle Proximité Solidarité
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