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Enfance & Famille

On joue ensemble : à l’école enfants, parents et professionnels tissent des liens de confiance en jouant

Type d'action

  • Education
  • Parentalité
  • Partenariat / transversalité
  • Pratiques professionnelles
  • Prévention
  • Protection de l’enfance

Département

Isère (38)

Sur le vif

« Le jeu contribue à désacraliser l’école, et c’est un formidable vecteur de socialisation. En jouant avec leurs enfants, les parents réalisent ce que les jeux peuvent apporter au niveau éducatif, social, cognitif. Bien souvent, d’ailleurs, ils les empruntent à la ludothèque après. Quant aux élèves, ils sont ravis que leurs parents aient trouvé leur place à l’école, ce qui contribue à leur réussite scolaire. », l’enseignante spécialisée du Rased

« Ça change notre image, on n’est plus celles qui jugent mais au contraire des personnes ressources que les familles peuvent contacter plus facilement », une assistante sociale de secteur.

Porteur(s) de l'action

Réseau d’Aide Spécialisée aux Élèves en Difficulté (RASED) de Allevard-Pontcharra (Isère)

Objectif(s) et bref descriptif

Afin de prévenir des difficultés d’apprentissage, d’accompagner des parents parfois désemparés face à leurs jeunes enfants et d’inciter les familles à recourir aux services de la ville qui leurs sont destinés, la rééducatrice du RASED de Allevard-Pontcharra a mis en place un dispositif d’accueil et de jeu partagé au sein d’une école maternelle. « On joue ensemble » réunit chaque semaine autour des enfants une communauté de parents et de professionnels (membres du Rased, travailleurs sociaux, bibliothécaires…) qui accompagnent de concert leurs évolutions. Passerelle entre l’école et la famille, ce temps de rencontre autour des activités ludiques permet de tisser des liens entre les différents acteurs de l’éducation d’un enfant. Ce dispositif permet également à tous les professionnels œuvrant auprès des familles et des enfants de se retrouver aux côtés de ces familles et de partager des moments ludiques et détendus qui facilitent le recours à leurs services.

Origine(s)

Ville au passé industriel très présent, la ville de Pontcharra compte 7000 habitants. Une commune à la tradition ouvrière où les différentes vagues d’immigration ont alimenté la population locale. Le quartier Villard Benoit en témoigne. Quartier populaire, avec beaucoup de familles d’origine étrangère, on y rencontre davantage de difficultés sociales. C’est la raison pour laquelle la municipalité a installé les structures sociales et culturelles au plus près du quartier et de ses habitants.

La médiathèque, la ludothèque, le centre social, un lieu d’aide à la parentalité sont accessibles à tous mais ne sont pas toujours investis par ceux qui en ont le plus besoin. Les services médico-sociaux du secteur constatent que les parents en demande d’aide ne vont pas spontanément vers les services et les professionnels susceptibles de les aider. Un constat partagé à l’école Villard Benoit plantée au milieu des zones pavillonnaires et des immeubles, où on évoque les difficultés des élèves mais aussi celles de leur famille.

La nécessité d’écouter d’abord les besoins des familles

Lors de l’année scolaire 2009-2010 la rééducatrice du RASED met en place un travail de prévention avec les classes de moyenne section de l’école maternelle Villard-Benoît. Les enseignants alertent alors le RASED sur les difficultés de leurs élèves : absentéisme, difficultés au niveau du langage et de la compréhension du français. A cette occasion, des liens de confiance s’établissent avec certains parents qui font part de leur désarroi face à des enfants auxquels ils peinent à fixer des limites. Ces difficultés à être écouté s’observe dès la sortie de l’école avec des enfants déjouant la surveillance des adultes et se mettant en danger sur l’espace public. Par ailleurs, certaines familles disent se sentir démunies en matière d’éducation, de rythme de vie pour les enfants, d’accompagnement dans les apprentissages de leurs enfants. Les parents reconnaissent qu’ils ne savent pas jouer avec leurs enfants, que cela ne fait pas partie de leur culture, d’ailleurs souvent les enfants ont à la maison des jouets qui ne sont pas adaptés à leur âge.

Une réflexion en réseau, école, Rased et travailleurs des secteurs éducatifs, sociaux et médico-sociaux (des rencontres avec le service médico-social départemental permettent de créer des liens) se met alors en place avec la conviction partagée qu’un travail de prévention doit se faire au niveau des familles et peut se fédérer autour de l’école. Aussi la mise en place d’un espace d’échange au sein de l’école, entre parents et enfants, entre parents, entre parents et professionnels, parait de nature à pouvoir créer une passerelle vers les aides possibles et à instaurer une relation de confiance.

Des conditions qui facilitent le travail ensemble

Avant de débuter le dispositif « On joue ensemble » les professionnels définissent des objectifs partagés reprenant les attentes exposées par les familles en les complétant de leurs observations pédagogiques, en particulier la prévention des difficultés d’apprentissage et d’insertion dans la vie collective, avec des enfants ne comprenant pas tous le français. Un café rencontre s’installe alors dans l’école chaque semaine pendant trois semaines, permettant d’informer sur les aides et les services existants au sein et en dehors de l’école. Un questionnaire rédigé en trois langues, français, turc, arabe permet par ailleurs d’informer et de connaître les attentes des familles. Ce questionnaire très simple sur la vie quotidienne sert surtout de sorte d’objet transitionnel avec les familles, permettant de les aborder et d’échanger avec elles. Le projet « On joue ensemble » débute à la rentrée 2010-2011.

Description détaillée

Chaque jeudi à 8h30 les parents qui le souhaitent se rendent avec leurs enfants au sein de l’école, dans la salle où sont installés des jeux, du thé et du café. La rencontre est ouverte aux parents et aux enfants des six classes de l'école maternelle. Pas d'inscription préalable demandée, ils viennent quand ils l'ont choisi, quand ils le peuvent. Certains sont accompagnés d'une petite sœur ou d'un petit frère, non scolarisés, qui ont leur place dans cet espace.

Une enseignante spécialisée, rééducatrice en Rased, les accueille. Ludothécaire, directrice de l'école, assistants sociaux, TISF, puéricultrices, bibliothécaire, psychologue scolaire sont présents, de façon régulière pour certains et à tour de rôle pour d'autres, pour jouer, échanger, écouter des histoires avec les participants du jour.

Après un rituel de présentation, enfants comme adultes s’installent en petits groupes autour des tables de jeux de société. Tandis que les uns jouent, certains adultes boivent un café́ et évoquent leurs problématiques ou tout autre chose. Puis tous se rejoignent autour des jeux alors que les professionnels tournent entre les différentes tables ou tapis. À 9h15 les jeux s’arrêtent et tout le monde range, c’est le moment de la lecture ou du conte, par un parent ou un professionnel volontaire, à 9h30 les parents raccompagnent leurs enfants dans les classes. Un point est rapidement fait par les professionnels après chaque séance pour préparer la séance de la semaine suivante et un bilan trimestriel avec les parents permet de revenir ensemble sur ce qui s’est passé et adapter la suite en fonction des observations. Un bilan annuel est l’occasion de faire le lien avec l’ensemble des actions en périscolaire.

Chaque semaine ce sont ainsi 20 à 30 personnes qui se croisent, jouent et échangent sous le regard bienveillant et attentif d’une équipe pluri professionnelle.

On joue ensemble, élément de la communauté éducative qui fluidifie le recours aux services

Contacts facilités, passerelle entre la famille et l’école, dédramatisation de la difficulté scolaire, les bénéfices pour l’école sont nombreux. Mais aussi pour les autres partenaires qui travaillent davantage en transversalité et tissent des liens de confiance avec les parents. Et en effet les regards changent : chez les professionnels qui apprennent à se connaître et à travailler ensemble mais aussi chez les parents qui ne voient plus l’école et les services sociaux de la même façon.
Le dispositif « On joue ensemble » est ainsi devenu un lieu de rencontre privilégié entre parents et enfants, entre parents, entre parents et professionnels et entre professionnels. Beaucoup de familles, ne maîtrisant pas la langue française, n’osant pas demander de l’aide, peu confiantes, ont découvert les services ouverts à tous, tels que la ludothèque et la bibliothèque. Quelques parents se sont d’ailleurs ensuite investis dans la vie de ces équipements.
Partager un moment d’échange, de jeu, un café avec les travailleurs sociaux du territoire permet de faire tomber les barrières et les représentations. Les familles qui fréquentent « On joue ensemble » ont acquis des réflexes de recours aux services dont elles font bénéficier les nouvelles familles qui arrivent dans l’école, jouant spontanément un rôle de relais. Et elles prennent des initiatives : création d’un spectacle pour les enfants, gestion d’un affichage à destination des parents, participation aux élections de parents, organisation de rencontres ou de moments festifs…

Les bilans font apparaître le plaisir pris à ces moments de partage, les familles témoignent de la qualité de l’accueil qui leur est réservé et de la découverte de l’importance du jeu dans le grandissement de leur enfant.

Aujourd’hui le nom « On joue ensemble » est déposé à l’INPI et l’action s’est répandue sur le territoire et des écoles de l’Ain, du Calvados, Haute-Garonne, Hérault, Indre-et-Loire, Loir-et-Cher, Loire-Atlantique, Rhône, Sarthe, Var, Vaucluse, et même de Tahiti…. l’ont mise en place. Cependant, l’action peut parfois s’arrêter faute d’un professionnel du RASED impliqué et reprendre dans une autre école.

Bilan

  • Les familles se mobilisent et s’investissent dans l’école : le taux de participation aux élections des représentants a triplé et des mères d’origine étrangère se sont présentées et font partie du conseil d’école.
  • La mobilisation concerne également le quartier : très urbanisé et traversé de routes les familles logées en habitat collectif ne disposaient pas d’un espace vert entre l’école et les logements. Elles se sont mobilisées pour obtenir un lieu pour pouvoir jouer dehors avant de rentrer et un bâtiment avec une cour a été mis à disposition par la ville.
  • La posture des professionnels est différente : chacun est dans le faire avec, avec les parents, avec les enfants et avec les autres professionnels dans une logique de co-construction où chacun est également important. Les liens de confiance s’en trouvent renforcés.
  • Les familles sont plus à l’aise avec les enseignants, et recourent davantage à tous les services du quartier ainsi qu’aux aides qui peuvent leur être proposées.

Partenaire(s)

Conseil départemental de l’Isère (assistants sociaux, TISF, puéricultrices)
Commune de Pontcharra, ludothécaire
Communauté de communes du pays du Grésivaudan, bibliothécaire

Moyens

Humains : les professionnels interviennent sur leur temps de travail financé par leurs différents employeurs

Financiers : les locaux sont ceux de l’école et aucun frais supplémentaire n’est engagé. Les seules dépenses de l’action sont les frais dits de convivialité : café, thé, gâteaux secs pris en charge par le conseil départemental de l’Isère, quelques dizaines d’euros chaque année et les parents apportent également des vivres.

Matériels : les jouets et livres mis à disposition sont ceux de l’école, du RASED, de la ludothèque et de la bibliothèque.

Contact

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