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Gouvernance & Territoires

Contrats de quartier : à Vernier, les habitants prennent la main

Type d'action

  • Développement social
  • Lien social
  • Inclusion
  • Accessibilité
  • Loisirs
  • Partenariat / transversalité
  • Pratiques professionnelles

Département

Suisse

Sur le vif

« Quand on voit d’où on est parti, avec toutes les difficultés de cette population, le chômage, la multiplicité des communautés, et ce que l’on est arrivé à faire en dix ans, c’est wahou ! On est très fier » une habitante, coordinatrice d’un groupe projet.

Porteur(s) de l'action

Les habitants et la municipalité de Vernier

Objectif(s) et bref descriptif

Afin d’améliorer la cohésion sociale et le vivre-ensemble au sein des quartiers de la ville de Vernier en Suisse, la Municipalité a souhaité encourager les initiatives des habitants, reconnaître leurs compétences et les rendre pleinement acteurs de la vie du quartier en leur permettant d’initier et de mener des projets d’utilité publique. A cette fin, un outil de démocratie participative a été mis en œuvre : le contrat de quartier. Il permet d’accompagner financièrement et méthodologiquement les habitants dans la mise en œuvre de leurs projets.

Origine(s)

En périphérie de Genève, la commune de Vernier est constituée de cinq quartiers hétérogènes, séparés les uns des autres par des infrastructures routières et industrielles : grands ensembles (dont la plus grande barre d’Europe), quartiers pavillonnaires en voie de gentrification, vieux bourg… Banlieue populaire, elle compte 35 000 habitants d’origines ethniques très diverses, le taux de chômage et le taux d’aide sociale les plus élevés du canton.

En 2005, le maire nouvellement élu, particulièrement sensible aux démarches de démocratie participative, souhaite réinstaurer du lien entre les habitants et entre les générations, lutter contre un sentiment d’insécurité de la population et favoriser une plus grande proximité des habitants avec la gouvernance et l’administration de la commune. Une délégation municipale est alors missionnée à Bruxelles où depuis 1993 se sont développés des « contrats de quartiers durables » associant la région, une commune et des habitants. A la suite de cette visite, une réflexion s’amorce avec les acteurs locaux, notamment avec les conseillers municipaux et les services de la commune pour les convaincre de l’intérêt d’une telle démarche et lever les craintes (perte de pouvoir décisionnel, non maitrise de l’agenda, surcharge de travail…). Un mode de fonctionnement et d’organisation est mis en place, garantissant l’autonomisation des habitants: il permet de faire remonter les projets portés par ces derniers, de les aider à les formaliser, puis de financer les actions qui ont été sélectionnées. Il donne une large place à l’initiative citoyenne et associe les acteurs institutionnels, associatifs et politiques locaux. Le premier contrat est signé en 2005 avec les habitants du quartier de Aïre-Le Lignon, puis entre 2008 et 2015 avec les quatre autres quartiers de Vernier.

Dix ans après la mise en place du premier contrat à Vernier, cinq autres villes suisses ont également mis en place cette démarche participative, dont Genève et Lausanne et une sixième s’apprête à faire de même. Un réseau informel s’est ainsi constitué entre les professionnels qui interviennent en appui auprès des habitants afin de capitaliser l’expérience des uns et des autres.

Description détaillée

Les contrats de quartier permettent à toutes les personnes qui habitent ou travaillent dans un quartier concerné, de proposer un projet d’utilité publique, de trouver son financement et de pouvoir rapidement le mettre en œuvre. Depuis leur création, se sont plus de 200 projets qui ont ainsi été réalisés à Vernier, soit jusqu’à 35 projets par an. La grande majorité de ces projets a été proposé par les habitants eux-mêmes. Seule une vingtaine a été proposée par des organismes (institutions, associations…).

Un portage politique fort
A cet effet, la municipalité met les compétences et les ressources de la commune à disposition de la population. Un financement annuel de 50 000 francs suisse (46 000 euros) est attribué à chaque contrat, dont 40 000 (37 000 euros) réservés aux projets, les 10 000 (9 000 euros) restants permettant d’assurer les frais de fonctionnement du dispositif (défraiement des membres du groupe de projet et de la coordinatrice). Voté par les élus municipaux il est renouvelé chaque année pour tous les contrats de quartier en dépit des forts clivages politique qui peuvent exister au sein de l’assemblée municipale. De plus, la commune apporte un soutien méthodologique et logistique aux projets : une délégation « contrats de quartier », composée de deux salariés, diffuse la démarche auprès des citoyens, joue les facilitateurs, permet de faire le lien entre les habitants et les services municipaux ; ces derniers interviennent également pour assurer techniquement et logistiquement la bonne réalisation du projet. Enfin, les politiques sont présents au sein d’une des instances de fonctionnement du contrat de quartier, le Comité de pilotage. Cette présence leurs permet de mesurer directement l’impact de la démarche, mais facilite également le rapprochement des citoyens et des politiques. Progressivement, les habitants sont moins dans la plainte et plus dans l’action, comme en témoigne le nombre et la variété des projets réalisés.

Des citoyens au cœur du projet



Afin d’impliquer pleinement les habitants, un mode de fonctionnement et un processus de décision participatifs ont été développés. Tous les contrats de quartiers fonctionnent sur le même modèle, qui permet aux habitants de s’investir dans la proposition, la réception, l’instruction, l’accompagnement et la validation des projets, avant qu’ils soient soumis à un arbitrage politique. Ils comprennent au moins une assemblée de quartier annuelle, un groupe de projet et un comité de pilotage.
L’ensemble des habitants et des usagers du quartier sont invités à participer au moins une fois par an à l’assemblée de quartier. Constituante du contrat de quartier pour la première assemblée, elle est ensuite un espace de dialogue et d’information. Y sont présentés le bilan des actions passées, ainsi que les projets en cours, mais surtout elle permet au Groupe projet et au Comité de pilotage d’être en lien direct avec la population. La première assemblée est réunie à l’issue d’un travail de plusieurs mois de sensibilisation des différents acteurs sur le contrat de quartier et les démarches participatives, afin qu’ils mobilisent à leur tour les habitants.

Le groupe projet est au cœur du dispositif. Composé d’une dizaine d’habitants ou de personnes qui travaillent dans le quartier, il est désigné lors de la première assemblée de quartier puis renouvelé chaque année sur la base du volontariat et de la cooptation après présentation des motivations du postulant. Au sein de chaque Groupe projet, un coordonnateur(trice), désigné(e) par le groupe, s’assure de son bon fonctionnement et de son autonomie dans l’exercice de ses missions. C’est également à ce coordonnateur de promouvoir et expliquer la démarche du contrat de quartier auprès des acteurs et habitants… Le groupe projet se réunit une fois par mois et son rôle est essentiel puisque c’est à lui que les projets portés par un ou plusieurs habitants sont d’abord soumis. Il les étudie, retient ceux qui offrent un caractère d’utilité publique et aide les porteurs à monter un dossier structuré contenant l’ensemble des informations de présentation, notamment budgétaires, techniques… Puis le groupe assure le suivi des projets et, au final, justifie de l’utilisation des financements octroyés.

Une fois le montage du dossier finalisé avec l’aide du groupe projet, le porteur va défendre son projet devant le Comité de pilotage du contrat de quartier, lors d’une de ses trois ou quatre réunions annuelles. Composé à parité de représentants politiques et institutionnels (dont un représentant du pouvoir exécutif municipal) et de représentants de la société civile (commerçants, directeurs d’école, responsables associatifs…), le Comité de pilotage a pour mission de valider les projets et débloquer les sommes allouées à leur réalisation. Bien préparé par les Groupes projet, la quasi-totalité des dossiers présentés sont acceptés et font preuve d’une grande diversité.



Priorité au vivre-ensemble
Les trois-quarts des actions proposées ont pour vocation à renforcer les solidarités de proximité et à impulser du lien entre les habitants : projet intergénérationnel pour lutter contre la fracture numérique, repas ou fêtes de voisinage, talents de nos quartiers pour valoriser les savoir-faire d’artisans locaux, « concourges » pour initier les enfants au jardinage et à l’écologie, projets d’échange et d’économie circulaire…
Le quart restant porte sur des petits aménagements urbains (installation de bancs, de main courante, aménagement de cheminements piétonnier, jardins partagés…), plus exceptionnellement sur des projets de grande envergure, comme la patinoire synthétique du Lignon. Un travail important est alors mené par les animateurs pour instaurer des collaborations avec des acteurs publics et privés, nécessaires à la réalisation technique de ces projets Les activités proposées sont au final accessibles gratuitement et leur fonctionnement géré par les habitants. Si un noyau d’habitants plus mobilisés initie les projets, ce sont ainsi plusieurs dizaines de bénévoles qui collaborent chaque année aux différents projets (plus de 80 pour faire fonctionner la patinoire…) et des centaines d’habitants du quartier et d’ailleurs, qui y participent : le diner de soupe de potiron à l’issue de « concourges » a par exemple réuni plus de 200 personnes en 2015.
Certains de ces projets, représentés et validés plusieurs années de suite, deviennent des moments attendus qui rythment la vie du quartier. D’autres, notamment les repas communautaires ont aujourd’hui trouvé leur modèle économique et des sources de financements (fonds privés) externes aux contrats de quartier. Enfin, certains projets ont été repris par le service de la culture ou le service des sports de la municipalité (patinoire, concerts…). Mais en étant initiés par les contrats de quartier, ils ont pu être mis en œuvre plus rapidement et les habitants se les sont mieux appropriés. Les contrats de quartier ont ainsi permis l’émergence de projets très diversifiés : si certains pouvaient être portés par des associations ou avec l’aide des Maisons de quartier, cela l’auraient été de façon plus limitée et sans le même engagement des habitants.
Après 10 ans d’existence, coordonnateurs et animateurs sont bien conscients des défis pour continuer à faire vivre les contrats de quartiers : comment continuer à mobiliser les habitants ? Comment renouveler les membres des comités de projets et les coordonnateurs ? Plusieurs occupaient déjà des fonctions au sein d’associations et certains sont en place depuis plusieurs années. Comment faire évoluer le dispositif pour maintenir la dynamique du début ?… Pour la première fois en 2015, quatre assemblées de quartier ont ainsi été réunies ensemble, dans un souci de simplifier l’organisation, mais surtout de créer une occasion supplémentaire de rassembler tous les habitants des différents quartiers et de les fédérer.
 

Bilan

Une enquête a été menée à l’occasion des 10 ans auprès des membres des groupes projets et des différents habitants qui avaient portés un projet dans leur quartier :

  • 63% des personnes interrogées ont l’impression de mieux connaitre leurs voisin(e)s et 83% que les contrats de quartier sont utiles pour renforcer les liens sociaux entre les habitants. 93% estiment que les contrats de quartier favorisent plus globalement la vie du quartier.
  • Elles sont au moins 93% à considérer que le dispositif contribue à améliorer la qualité de vie dans le quartier, en apportant des résultats concrets et visibles aux besoins réels des habitants
  • Enfin 76% pensent que les contrats de quartiers sont utiles pour rapprocher les citoyen(ne)s de l’administration et des autorités. Des problématiques propres au quartier peuvent remonter plus facilement auprès des politiques et de l’administration.

En plus de ces résultats, d’autres impacts sont également évoqués par les acteurs :

  • Des changements de pratiques professionnelles entre les services municipaux, qui ont appris à travailler plus en transversalité ;
  • Le développement d’une identité forte en tant qu’habitants d’un quartier, mais également une réelle fierté en tant qu’habitant de Vernier;
  • La diminution des incivilités et du sentiment d’insécurité.

Partenaire(s)

Les contrats de quartier ont bénéficié depuis leur création d’une multitude de partenaires, dont le soutien a parfois été ponctuel sur un projet particulier.
Sans les citer tous, ces partenariats proviennent d’institutions (Bureau de l’intégration, département de l’instruction publique…), d’entreprises (Grande distribution, entreprise de téléphonie, association de commerçants…) et d’associations.

Moyens

Financiers :
50 000 CHF par an par contrat de quartier (46 000 euros), soit 250 000 CHF (230 000 euros) au total.

Humains :
La délégation contrat de quartier de la ville de Vernier emploi un Délégué contrat de quartier et un travailleur social, soit 1,5 équivalent temps plein.
Chaque Groupe projet dispose d’un coordonnateur.
La Commune met également à disposition les collaborateurs des services municipaux selon la nature du projet.

Matériels :
La commune met à disposition les emplacements pour réaliser les projets et la logistique nécessaire.
Chaque groupe projet dispose d’un lieu de réunion.
 


Sites internet
Chaque contrat de quartier dispose de son propre site internet :
http://www.cqvernier.ch/aire-le-lignon
http://www.cqvernier.ch/avanchets
http://www.cqvernier.ch/chatelaine-balexert
http://www.cqvernier.ch/vernier-village
http://www.cqvernier.ch/lgb

Contact

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